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TORTUES MARINES
Le Sénégal, en dehors de ses parcs nationaux, dispose d’un «Village des tortues», comme cela existe aussi en France. Ce village, créé en 1993 à Keur Ndiarou, sur financement de l’Union européenne (Ue), n’a ouvert ses portes au public qu’en 1996. Niché, depuis 2001, à Noflaye, dans la Communauté rurale de Sangalkam, ce sanctuaire est dédié à la préservation des tortues qui sont une espèce menacée dans leurs habitats naturels.
Un site créé en 93 par le Français Bernard Devaux sur financement de l’Ue
Selon Lamine Diagne, responsable animalier dudit village, le nom de «Village des tortues» est venu de l’idée d’un Français, Bernard Devaux. Après avoir créé un village des tortues en France, M. Devaux a eu l’idée de collaborer avec des Sénégalais pour en faire de même au Sénégal. Ainsi, le «Village des tortues» du Sénégal a-t-il vu le jour. Et M. Devaux a mis en place trois «Villages des tortues» dans le monde, en France, au Sénégal et à Madagascar, renseigne M. Diagne.
Le «Village des tortues» est situé sur la route du Lac rose, à 35 km à l’Est de Dakar, juste après le village de Sangalkam. C’est un centre de repeuplement soutenu par le «Village des tortues» de Gonfaron, en France, et la direction des eaux et forêts du Sénégal. Le village récupère des tortues adultes et organise la reproduction, avant de procéder à des lâchers dans des zones surveillées. Le village s’étend sur plus de 15 hectares. Les tortues sont réparties sur 2 hectares aménagés et le reste de l’espace sert de refuge à d’autres animaux sauvages, tels que les oiseaux, les singes, les chacals, les serpents, les varans et autres.
Un village peuplé de 250 tortues, dont la plus âgée a 90 ans
Lamine Diagne, responsable animalier du village, explique que le centre ne comptait que trois tortues au début, mais aujourd’hui il est peuplé de 250 spécimens, dont 30% de femelles, et la plus âgée a 90 ans. Il a fait savoir aussi que le village fait des relâches avec suivi, dont la première remonte à 2006 et la seconde en 2011. Au total, une cinquantaine de tortues ont été remises dans la nature par le village. Les tortues sont adolescentes dès l’âge de 13 ans et c’est à cet âge qu’elles sont relâchées dans leur milieu naturel.
Sur les lieux, il y a différents enclos sanitaires, une quarantaine, des écloseries et nurseries, le bassin à tortues d’eau et les enclos à reproduction. Pour assurer une visite guidée aux visiteurs, une équipe de cinq permanents et un biologiste spécialisé sont à pied d’œuvre. Les visites guidées sont organisées de 9 heures du matin à 19 heures tous les jours, le dimanche y compris.
Dans ledit village, il y a un enclos très particulier qui est dénommé «La nurserie». Et comme son nom l’indique, c’est là que sont recueillis et protégés les bébés tortues. Mais dès qu’elles ont atteint l’âge de 8 ans, elles sont transférées dans un autre enclos. Au total, il y a 9 enclos pour les tortues jeunes et 6 pour les adultes, informe M. Diagne.
Des visites tarifiées entre 1000 à 3000 francs
Enfin, il faut noter que pour accéder au «Village des tortues» du Sénégal, les touristes et autres visiteurs adultes doivent payer un montant de 3 000 francs et 2 000 francs pour les enfants. Quant aux résidents de la zone, ils déboursent 2 000 francs pour les adultes et 1 000 francs pour les enfants.
Il est à noter également que le village dispose d’une boîte à pharmacie et d’un spécialiste animalier pour soigner et déparasiter les tortues. Le village compte ouvrir une clinique spécialisée pour le traitement des tortues, dans les années à venir, annonce son responsable, Lamine Diagne.
LAMINE DIAGNE, RESPONSABLE DU «VILLAGE DES TORTUES» DU SENEGAL
«Nous n’avons aucun soutien financier de l’Etat, ni de la collectivité locale»
Le «Village des tortues» est une structure publique qui ne survit que grâce aux visiteurs qu’elle reçoit. En effet, selon les responsables du village, le gouvernement ne leur accorde aucun soutien. «Nous n’avons aucun soutien financier de l’Etat, ni de la collectivité locale pour l’entretien du village depuis sa mise à notre disposition», regrette Lamine Diagne, responsable animalier du site, par ailleurs un des membres fondateurs du «Village des tortues» du Sénégal.
A l’en croire, M. Diagne, la prise en charge du personnel et l’alimentation des tortues sont assurées par la vente des tickets d’entrée des visiteurs. A cela s’ajoute le soutien de quelques partenaires financiers comme la Soptom. Cette dernière donne un budget de 130 000 francs tous les mois pour la nourriture des tortues. M. Diagne trouve anormal le fait que le Comité de gestion du village a été substitué par un gérant en 2007. Parce que, explique-t-il, «le village n’est pas une structure privée, mais publique». Pour lui, «ce système n’est rien d’autre que de la politique et il peut décourager les partenaires et constituer un handicap pour eux. Il ne permet pas de régler leurs difficultés, car il n’y a pas de décideur».
Pour Lamine Diagne, le village n’a pas de difficultés majeures dans sa gestion. Le seul problème qu’ils ont, est qu’une partie du mur du village est tombée et n’a pas encore été réfectionnée. Et, depuis lors, les animaux domestiques, mais surtout des gens, entrent dans la zone réserve du village pour y couper des arbres. Il informe que la charge mensuelle du village tourne autour d’un million de francs. Et les recettes journalières issues des entrées varient, selon les périodes, et peuvent aller jusqu’à 200 000 francs. Mais le village est plus visité entre les mois de septembre et décembre. Et ce sont les Sénégalais qui viennent le plus.
Le personnel compte 8 membres. A savoir, un gérant, une caissière, une responsable de tickets, une équipe animalière (trois personnes) et 2 gardiens. Une partie du personnel est salariée, les autres sont des bénévoles. Evoquant sa motivation pour ainsi s’ériger en défenseur des tortues, Lamine Diagne de révéler qu’il est un passionné des tortues. Car son père élevait des tortues chez lui. C’est pourquoi, dit-il, «mon cousin et moi avons eu l’idée de monter un projet avec le Français M. Devaux. Ainsi, nous avons aménagé un site d’un hectare à l’entrée de Keur Ndiarou pour les tortues. Et, c’est là que le premier village des tortues est né. Au début, ce n’était pas facile, car les gens nous traitaient de fous».
Esperance de vie La tortue peut peser une tonne et vivre 300 ans…
La tortue fait partie de ce lot d’animaux à l’espérance de vie élevée au monde. Une tortue peut, en effet, vivre jusqu’à 300 ans et atteindre le poids d’une tonne.
Au Sénégal, les tortues sont classées en trois catégories. A savoir, les tortues de terre, les tortues d’eau douce et les tortues marines. Mais les gens ne font pas la différence parfois. Et la plus grosse tortue de terre est protégée dans le «Village de tortues» du Sénégal, sis à Noflaye. Mais le village n’a pas de tortue marine. Lamine Diagne, responsable animalier dudit village, explique qu’il existe 11 espèces de tortues au Sénégal, dont 6 d’eau douce, 4 marines et une inconnue.
Au Sénégal, il existe 11 espèces de tortues, dont 6 d’eau douce, 4 marines et une inconnue
Concernant les tortues d’eau douce, M. Diagne de faire savoir qu’elles ne dépassent jamais 1,5 kg au Sénégal. Il indique que ce groupe de tortues est carnivore et se nourrit de la viande, d’insectes et un peu de poisson. Ces tortues sont plus agressives que celles de terre et peuvent vivre jusqu’à 45 ans. Donc, elles ont une durée de vie courte par rapport aux tortues de terre qui peuvent vivre jusqu’à 150 ans. Les tortues marines sont elles plus grosses que toutes les autres. En effet, certaines d’entre elles peuvent aller jusqu’à 300 kg. Ces tortues peuvent atteindre jusqu’à une tonne de poids et vivre pendant 300 ans
Lamine Diagne rappelle que les tortues sont une espèce en voie de disparition et que bon nombre d’entre elles ont d’ailleurs disparu aujourd’hui à cause de l’homme. Cette disparition est due, selon lui, aux «croyances africaines». Parce que, les gens disent que «la tortue, c’est le symbole de longévité, elle porte bonheur et soigne la maladie de l’asthme», dit-il. Voilà donc pourquoi, les gens capturent la tortue pour l’élever chez eux. Et, ce phénomène crée la disparition de l’espèce dans le milieu naturel. Selon lui, des études ont prouvé qu’aujourd’hui, plus de 2 000 tortues sont en détention.
«Bill», 76 ans, 90 kg, plus grosse tortue du Village
La plus grosse tortue du «Village des tortues» du Sénégal s’appelle Bill. Elle pèse 90 kg environ et est âgée de 76 ans. Lamine Diagne confie, à propos des tortues de terre, qu’elles peuvent aller jusqu’à 100 kg et vivre jusqu’à 150 ans. Mais en captivité, elles vivent moins longtemps. Parce que les conditions d’alimentation dans les maisons ne sont pas favorables. En effet, une tortue de terre est un herbivore, donc elle doit manger tout ce qui est herbe et fruit.
«Pour les tortues d’eau douce, nous avons la Pelusios adansonii qu’on retrouve dans le fleuve Sénégal, la Pelusios castaneus visible dans les régions de Tambacounda, Kaolack et Dakar, la Trionyx triunguis (en voie de disparition), la Cyclanorbis senegalensis (entre le fleuve Gambie et Sénégal), la Kinixys Belliana qu’on retrouve en Casamance et en Guinée Bissau et enfin nous avons la Pelomedusa Subrufa. C’est une tortue d’eau douce que l’on voit au Sénégal pendant l’hivernage. Après la saison des pluies, elle s’enterre et peut dormir sous la terre pendant 9 mois et reste la plus connue par les Sénégalais», informe Lamine Diagne.
«Une tortue peut boire le tiers de son poids d’un coup et rester pendant des mois sans boire»
Par rapport à l’alimentation des tortues, M. Diagne de dire qu’elles sont nourries tous les matins à partir de 10 heures et une seule fois dans la journée. Mais elles peuvent rester deux journées sans manger. Au «Village des tortues», dans chaque enclos, il y a deux récipients d’eau. «Parce qu’une tortue, quand elle a soif, peut boire le tiers de son poids d’un seul coup et peut rester pendant des mois sans boire», précise notre interlocuteur qui rapporte qu’elle conserve alors l’eau dans son corps, comme le fait aussi le chameau.
Pendant l’hivernage, les tortues sont nourries avec de l’herbe fraîche. Mais en saison sèche, elles se nourrissent avec de la paille d’arachide, des fruits et de légumes. M. Diagne ajoute que l’excrément d’une tortue contient de l’engrais et enrichit le sol. La tortue dissimile les graines dans le milieu naturel à travers son excrément.
La tortue et l’asthme
Les gens disent que «la tortue peut soigner la maladie de l’asthme», confie Lamine Diagne pour qui, «cette affirmation n’est qu’une croyance africaine. Car elle n’est pas encore prouvée scientifiquement». Toutefois, il fait savoir que beaucoup de gens viennent leur demander l’eau de la tortue et qu’ils en donnent. Mais, il précise que cette eau, pour qu’elle soit utile pour les asthmatiques, il faut que la tortue l’avale et la rejette aussitôt par ses narines. Et, d’après lui, c’est seulement les tortues de terre qui peuvent soigner un peu cette maladie, si tel est le cas.
Le «Village des tortues» du Sénégal est partenaire de celui de la France. Aussi, la tortue est protégée au Sénégal par une loi. Sa vente est d’ailleurs formellement interdite.
… Et pondre jusqu’à 90 œufs dans l’année
La tortue est un reptile terrestre ou aquatique qui se déplace très lentement et dont le tronc est couvert d'une carapace osseuse recouverte d'écailles. La tortue mâle possède une concavité sur la face ventrale de sa carapace. Ce qui lui permet de ne pas glisser lorsqu'elle grimpe sur sa compagne. La femelle, quant à elle, a une carapace convexe bombée vers l'extérieur. Et le mâle a une carapace plus concave que celle de la femelle. En règle générale, le mâle a une queue plus longue et plus étroite à la base, et un cloaque plus proche de l'extrémité de celle-ci.
Il faut noter que plus la tortue est jeune, plus il est difficile de déterminer son sexe. La femelle a le plançon assez plat sous forme d’un creux pour permettre au mâle de monter pendant l’accouplement. La durée de l’accouplement des tortues peut faire 1 heure 30 minutes au moins. Une tortue peut pondre au moins 30 œufs par ponte et elle fait trois séries de ponte dans l’année. Ce qui fait qu’elle peut avoir 90 œufs ou plus par an.
La température détermine le sexe de la tortue
La tortue, après avoir pondu ses œufs, les enterre sous forme d’escalier et ne s’en occupe plus. Et les œufs qui sont en haut sont plus chauds (entre 30 et 32°c) et sont des mâles. Les autres sont moins chauds (28 et 26°c) et sont des femelles. C’est la température qui détermine le sexe de la tortue, selon Lamine Diagne, responsable animalier du «Village des tortues» du Sénégal. Ces œufs sont ramassés et enterrés à 40 ou 50 cm au sol pendant 110 jours. Les œufs sont ronds comme des balles de ping-pong et ils sont protégés par la chaleur.
Il faut aussi savoir que les bébés tortues ne naissent que pendant l’hivernage, dès les premières pluies, avec un poids de 35 grammes. Après leur naissance, les bébés tortues ne se nourrissent que d’herbe fraîche, de légumes et d’eau. Elles sont bien suivies pour voir leur évolution et autres. Cette année, Lamine Diagne espère avoir 150 naissances de tortues dans son sanctuaire. Selon lui, les naissances varient, chaque année, et dépendent de la qualité de l’alimentation. Dans chaque naissance, il y a plus de mâles que de femelles.
La tortue, quand elle est malade, ne mange pas et reste immobile dans son coin. Selon M. Diagne, c’est rare qu’une tortue meurt. Du reste, il affirme que le village n’a jamais enregistré 10% de décès depuis sa création.