I – Contexte 
Le Sénégal dispose d’une frange littorale d’environ 718 km de long et d’un espace maritime de 198 000 km2. Le plateau continental, limité par l’isobathe des 200 mètres , s’étend sur 28 700 km2 et la Zone Economique Exclusive (ZEE) s’étend sur 200 miles marins.
Les côtes sénégalaises sont caractérisées par une grande diversité morphologique. Les écosystèmes côtiers sont constitués par des côtes sableuses (la Grande Côte), des côtes rocheuses (presqu’île du Cap Vert), des zones humides côtières (Niayes), des mangroves, des îles sableuses et des bolons dans les deltas du Saloum et du Sénégal et des vasières au sud de l’embouchure de la Casamance.
La côte du Sénégal comporte à la fois des corridors, des aires d’alimentation et des sites de reproduction de grande importance pour les tortues marines comme la tortue verte, la tortue caouanne, la tortue luth, la tortue imbriquée, la tortue olivâtre et la tortue de Kemp . Ces tortues, qui partent de la Guinée Bissau, utilisent des sites (particulièrement la RBDS, le littoral de Joal-Fadiouth…) comme des étapes importantes de leur migration (zone d’alimentation et de reproduction) vers le Banc d’Arguin en Mauritanie.
Les activités économiques (industrie, tourisme, commerce, transports portuaires) sont fortement concentrées dans la zone côtière qui abrite une grande partie des établissements humains et de la population urbaine du pays.
Ceci se traduit par une forte pression anthropique qui engendre la dégradation des écosystèmes marins et côtiers du fait de l’urbanisation mal contrôlée et de la pollution.
Les écosystèmes de mangroves subissent une forte dégradation liée aux facteurs climatiques et anthropiques. Les effets des phénomènes de salinisation des eaux et d’acidification des sols se sont amplifiés au point d’entraîner une réduction drastique des zones de mangroves et des rizières au profit des tannes qui se sont considérablement étendues. Par exemple, dans l’estuaire de la Casamance, la surface occupée par les palétuviers qui était d’environ 900 km2 en 1979, est actuellement estimée à 820 km2. Toujours en Casamance, 70 à 80 % des palétuviers rouges (Rhizophora) ont disparu depuis 1969.

Ces facteurs naturels ont été amplifiés ces dernières décennies par les actions anthropiques notamment : la coupe abusive et incontrôlée de la mangrove (bois, perches, cueillette des fruits de mer…) et les aménagements de rizières (barrages anti-sel). Dans la RBDS, la  quantité de bois de mangrove utilisée est de 5 000 tonnes pour l’usage domestique et 12 000 tonnes pour le fumage de poisson. En Casamance, la mise en place de retenues dans l’estuaire a entraîné une importante perte de superficies de mangroves en faveur des tannes, qui ont augmenté de 107 km2.

Ces dernières années, les Aires Marines Protégées (AMP) sont de plus en plus utilisées pour restaurer les ressources halieutiques et protéger les écosystèmes. Les AMP, quand elles sont bien situées et gérées convenablement, constituent des outils performants pour la conservation de la biodiversité et la gestion durable des ressources marines et côtières. Elles permettent de préserver des habitats-clés tels que les herbiers marins, les mangroves, les vasières, les estuaires et deltas, les milieux insulaires etc., considérés comme critiques pour le renouvellement des ressources halieutiques et la conservation de la biodiversité associée : nourriceries, zone de reproduction, voie de migration. Ce sont des milieux privilégiés pour la reproduction des espèces et le grossissement des juvéniles, qui contribuent de ce fait à la durabilité des activités humaines basées sur leur exploitation. 

Les AMP sont de plus en plus reconnues comme un outil de gestion durable des pêcheries et sont mieux prises en compte dans la définition des mesures de politiques des pêches en Afrique de l’Ouest.

II – Justification 
Face à la vulnérabilité et au manque d’efficacité de gestion des ressources halieutiques, les AMP sont appelées à jouer un rôle important dans la régénération de ces ressources, la pérennisation de la pêche et des activités connexes au Sénégal. Un autre argument qui milite en faveur de la création d’AMP est qu’elles constituent en quelque sorte, une police d’assurance contre l’échec des autres formes de gestion des ressources halieutiques. 

Comprenant l’importance de cet outil de gestion, le Gouvernement du Sénégal, a mis en place un réseau d’AMP permettant d’une part de préserver la diversité biologique et culturelle de la zone côtière, et d’autre part de promouvoir l’amélioration des moyens d’existence des populations locales (lutte contre la pauvreté des communautés résidentes). 

Le réseau d’AMP au Sénégal est composé de quatorze Aires Protégées Côtières et Marines Il s’agit du Parc National de la Langue de Barbarie, du Parc national des Iles de la Madeleine, du Parc National du Delta du Saloum, du Parc National de la Basse Casamance, de la Réserve Naturelle de Popenguine, de la Réserve Spéciale de Faune de Gueumbeul, la Réserve Ornithologique de Kalissaye, de la Réserve Naturelle Communautaire de Palmarin, de la Réserve Naturelle d’interet communautaire de Somone et des cinq AMP que sont Saint-Louis, Cayar, Joal-Fadiouth, Abéné et Bamboung. 

Ce réseau a permis de protéger des sites ayant une valeur écologique, sociale, économique et de favoriser la prise de conscience des acteurs locaux en faveur de la conservation et de la gestion durable des ressources marines et côtières.

Cependant, l’analyse SWOT effectuée dans le processus d’élaboration de la stratégie nationale du réseau d’AMP a montré qu’il ya des faiblesses comme :

  • L’insuffisance de la recherche, de la diffusion et de la valorisation des résultats ;
  • L’insuffisance de l’analyse des lacunes en matière de création des AMP ;
  • Des lacunes dans la mise en évidence de la valeur socio-économique des AMP ;
  • L’inexistence d’une typologie des AMP.

Dans le même temps, des menaces sont identifiées et ont pour noms :

  • Surcapacités des moyens d’exploitation des ressources halieutiques ;
  • Pollution marine ;
  • Impacts des changements climatiques.

La création en mai 2012  de la Direction des Aires marines Communautaires Protégées (DAMCP) vient traduire la volonté de l’Etat à apporter des réponses adéquates à ces faiblesses et menaces identifiées. L’une des missions majeures de cette direction est de promouvoir la recherche scientifique dans les aires marines protégées, notamment sur les écosystèmes et sur les espèces de la zone marine et côtière afin d’éclairer les processus des prises des décisions et de motiver les choix et les options en matière d’aménagement des écosystèmes et de gestion des stocks de poissons.
Au fur et à mesure que les programmes d’AMP évoluent, la science devient primordiale non seulement pour les études, mais aussi pour le développement des technologies nécessaires à la recherche de résultat, le suivi et la boucle de rétroaction (Kelleher, 1999).
C’est dans le but de contribuer à la réalisation de cette mission que la DAMCP propose de conduire un projet de mise en place d’un observatoire sur les AMP. Du réseau des 14 AMP identifiées, cette direction a sous sa tutelle 7 que sont : la Réserve Naturelle Communautaire de Palmarin, la Réserve Naturelle d’intérêt communautaire de Somone et les cinq AMP de Saint-Louis, Cayar, Joal-Fadiouth, Abéné et Bamboung. 

                      
Figure 1 : Réseau des aires marines communautaires sous tutelle de la DAMCP

Il est nécessaire de rappeler que l’engagement lors de la COP 10, plus connu sous le nom de objectifs de Aïchi où les Parties ont convenu que « D’ici à 2020, au moins 17% des zones terrestres et d’eaux intérieures et 10% des zones marines et côtières, y compris les zones qui sont particulièrement importantes pour la diversité biologique et les services fournis par les écosystèmes, sont conservées au moyen de réseaux écologiquement représentatifs et bien reliés d’aires protégées gérées efficacement et équitablement et d’autres mesures de conservation efficaces par zone, et intégrées dans l’ensemble du paysage terrestre et marin ».
Le réseau sénégalais actuel ne couvre que 1% du territoire marin ; d’où les efforts d’augmentation consentis par la DAMCP pour continuer ce processus de classement (cf. carte ci-dessous)


Figure 2 : Carte de localisation des initiatives de création d’AMP

De ces initiatives, celles de l’AMP de Fambine (appelée Gandoule) et celle de Sangomar ont été déjà créées par arrêté du Conseil Régional de Fatick.

Notons que ce projet de mis en place d’un observatoire entre en droite ligne des orientations stratégiques de la Lettre de Politique Sectorielle de l’Environnement et des Ressources Naturelles (LPSERN 2009-2015), notamment en ses Objectifs Spécifiques 2 et 3 intitulés respectivement : « intensifier la lutte contre la tendance actuelle à la dégradation de l’environnement et des ressources naturelles dans le respect des conventions internationales y afférentes » et « renforcer les capacités institutionnelles et techniques des acteurs dans la mise en œuvre des actions de conservation de l’environnement et des ressources naturelles ». 
La mise en place de ce projet contribuera aussi au Programme 1 du Document de Programmation Pluriannuelle des Dépenses Publiques 2013-2015 qui vise l’Amélioration de la base de connaissance de l'environnement et des ressources naturelles.

II – Objectifs du projet :
L’objectif général de ce projet est de contribuer à une maîtrise des connaissances sur l’état des écosystèmes et la dynamique des stocks au niveau des AMP.
Le projet visera spécifiquement à :
1.    Développer un système de collecte, de traitement, d’analyse et de partage des données sur les AMP
2.    Valoriser et intégrer les savoirs locaux dans le système d’information
3.    Développer un mécanisme d’auto financement 
III - Résultats attendus 
Les résultats suivants seront attendus :

OS1 : Développer un système de collecte, de traitement, d’analyse et de partage des données sur les AMP
R11 : Un modèle de suivi et de surveillance est mis en place
R12 : Des infrastructures et installations sont mises en place 
R13 : Des équipements adéquats/adaptés sont en place
R14 : Les acteurs sur le terrain (toutes parties prenantes) maitrisent les outils pour la collecte de données et le suivi

OS2 : Valoriser et intégrer les savoirs locaux dans le système d’information
R21 : Les connaissances et pratiques locales bénéfiques pour une gestion durable des ressources sont connues et capitalisées
R22 : Les connaissances endogènes et scientifiques sont bien articulées entre elles et intégrées dans le système de gestion des AMP

OS3 : Développer un mécanisme d’auto financement 
R31 : La coopération scientifique et technique à l’échelle internationale, sous régionale et nationale est promue
R32 : Des programmes de recherche conjoints sont développés
R33 : Une stratégie de mobilisation de ressources est mise en place